"Et parfois c'est comme ça", 5e album solo du chanteur. L'homme continue son introspection, entamée en 2001 avec "Ça ne me suffit plus".
Pour certains, il suffit d'une barre chocolatée; dans la vie de Jeff Bodart, c'est quand une histoire d'amour se termine que tout redémarre. Il nous avait déjà fait le coup, en 2001, à la sortie de "Ça ne me suffit plus". Serment d'ivrogne ? Sur son nouvel album, il le chante, en tout cas, sur "Demain matin" : "Demain matin, dès les premières heures livides/Demain matin, quand cette bouteille sera vide/Demain matin, mon passé je le liquide/Mais ce soir, le vin est tiré je vais le boire".
C'est que, derrière "Et parfois c'est comme ça", titre de ce cinquième album solo, on verrait bien ce constat : "On ne peut rien faire contre, c'est ma nature". Ce que l'intéressé dément. Il semble bien décidé à se débarrasser de quelques vieux oripeaux. En soignant le mal par le mal ? Toujours est-il que sur la pochette, il remercie, notamment, Malcolm Lowry et Pierre Mérot. Des auteurs aux productions - "Au-dessous du volcan" et "Mammifères" - marquées par l'alcool. Auteur-compositeur-interprète, Jeff Bodart aime cependant faire appel aux fidèles. "Ma famille, mon cercle élargi d'amis, ceux dans les bras desquels je tombe à chaque fois qu'on se voit". Au crédit des treize interprétations qui composent l'album, on retrouve donc l'infatigable François Bernheim, l'incontournable Jacques Duvall, les ex-Gangsters Olivier Bodson, Pierre Gillet et Henri Hiernaux. Le rire de Miossec, aussi... Si l'album est mixé par Patrice Cramer à Miami, masterisé par Dave Collins à Los Angeles, il est avant tout enregistré et réalisé par Denis Moulin, le fils de Marc, qui possède un studio à Montpellier.
Ce n'est donc pas un hasard si l'on croise Isabelle Antena aux choeurs - qui n'est autre que la compagne dudit Denis. Montpellier, Miami : des villes où Jeff Bodart s'est rendu. Sur la pochette, il est attablé à la terrasse de ce qu'il nomme un dépanneur (non, non, on n'est pas au Québec, mais quel joli mot !). Chapeau à la main, comme un mini-parasol protégeant son visage du soleil. L'ombre est infime. Peut-être représente-t-elle l'ultime part d'intimité qu'il se réserve ? A force de se dévoiler au gré des albums... C'est ça aussi la vie d'artiste.
Ainsi dans "Ma carcasse" évoque-t-il "une monture qu'il ne ménage pas" . L'on pense alors à ses extravagances sur scène; lui complète en évoquant "(mes) chutes de cheval et (mon) caractère extrême" . Et de commencer à détailler les différentes parties de son corps rafistolées grâce à des plaques en titane ! Cet album, Jeff Bodart l'a voulu "nature", loin des sons artificiels des synthés.
Quand, de ci de là, pointe un orgue Hammond ou un Rhodes Fender, c'est clair qu'ils colorent très rapidement un morceau. A l'entame d'"Embrasse-moi", on se pince. Nous voilà projetés dans un bal poisseux, alors que sort des haut-parleurs le slow de la dernière chance. Ce n'est autre que la reprise de "Ik hou van U" interprété par Noordkaap à l'occasion des 175 ans de la Belgique. Serait-ce la contribution de Jeff le wallon à l'unité de la Belgique ? "Pourquoi pas ?" rigole l'intéressé. Bon, alors en duo avec Arno, histoire d'y mettre un second degré.
Ceci dit, à l'écoute de "De quoi j'ai l'air", on n'en a pas fini avec le bourdon ! Si, depuis "Ça ne me suffit plus", l'homme a décidé d' "éclairer une autre facette de (ma) personnalité" , nous voilà servis. Mais bon, ce serait sans compter sur le printanier "L'oiseau de 7h32" ou le remuant "Notre trajectoire". Alors, comme il le chante si bien sur "Fou sans toi" : "Dans tout coeur de boxeur/Y'a le soap opera en veille/dans tout coeur d'un frimeur/Une fleur bleue qui sommeille". Marie-Anne GEORGES
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